Pourquoi faut-il donner ce qu'on n'a pas gagné
Autrement qu'en naissant, juste du bon côté ?
Regardez, je suis né, tout en haut du panier…
Toujours j'ai profité, bien coiffé, bien botté…
Alors pourquoi devrais-je perdre mon héritage ?
Gardez-moi du malheur de changer d'ermitage
Et de ne plus manger du foie gras en potage !
Pourquoi les bons Français devraient-ils se priver
Afin que les Bantous aient des commodités ?
Rien ne relie les deux, c'est une absurdité !
Tirons la Terre au sort, pour les terres cultivées !
À chaque génération, posons-nous la question :
Gardons-nous les richesses que nos pères ont bâties,
Et tant pis pour tous ceux aux ancêtres aplatis ?
Parce que je suis né dans la boue et que toi,
A peine sorti du ventre, on t'a mis dans la soie,
Rien ne me paraîtrait plus juste qu'avoir un toit,
Tandis que tes pareils n'auraient plus rien pour soi…
A la rigueur, on peut choisir un compromis,
Garde un peu de ton fric que les pauvres ont vomi
Et donne-moi le reste pour mon autonomie !
Pour les siècles des siècles, les riches ont dominé,
Alors il est bien temps pour ces abominés,
Repus crapauds puants, de rentrer dans le rang,
Temps pour les pauvres gens de voir l'or qu'on leur rend,
Avec tout le confort dont on les a privé…
Guidons l'humanité sur des voies cultivées,
En rendant à chacun la chance d'y arriver !
Pour moi, tous les humains ont droit, à parts égales,
Aux richesses de la Terre, qu'ils viennent du Sénégal,
Roumains ou eskimos, de Paris, d'Argentine…
Tous devraient être égaux passant à la cantine,
Avalant la même soupe, mangeant les mêmes tartines,
Grandissant vers un but commun au genre humain,
Et heureux d'être fiers de se donner la main…
Pardon, l'hérédité est un sujet marrant :
A quand remonte l'idée de punir les enfants,
Rien que pour les pêchés commis par les parents ?
Tandis que l'on pourrit les enfants des héros
Alors qu'ils n'ont rien fait, qu'ils sont de vrais zéros,
Gavés comme petits princes, tandis qu'à l'opposé,
Eperdus, miséreux, la mort va s'imposer…
Profitant des ancêtres, qui ont bien su voler,
Avec aplomb on croit que d'être cageolé
Revient à valoir plus que le gars d'à côté…
Tandis qu'au plan réel, la vie n'a nulle beauté
Alors qu'on est un pou, parasite surnoté,
Grimpé avec aplomb sur la tête chapeautée,
En croyant qu'on est l'âme de la communauté…
Prenez des paresseux, devenus miséreux,
Alors que les meilleurs, au destin onéreux,
Rêveront dans la soie pour toute l'éternité,
Transmettant leur fortune à leur continuité,
Aux enfants des enfants qu'ils auront perpétués,
Gonflés d'indifférence pour ceux que l'on va tuer,
Etrangers, ignorants, affamés, prostitués…
Poussez bien sur leurs têtes pour mieux les enfoncer !
Après l'esclavagisme et les belles colonies,
Regardez où ils sont, ces gens à peau foncée !
Tandis que l'on prospère, vivant en harmonie,
A l'autre bout du monde, on torture, on survit…
Gros bras dans tous les coins, et, bien sûr, des nervis,
Et de la corruption, toujours en éruption !
Peux-tu imaginer de sacrifier un peu
A la fois ton confort, tes vacances, si tu peux,
Réduisant tes dépenses, pour qu'au bout du tiers monde,
Trois enfants puissent aller à l'école, s'épanouir,
Alors que jusqu'ici, dans leur survie immonde,
Grattant dans les ordures, bien près de s'évanouir,
En damnés, ils n'avaient qu'une vie de navet ?
Possession, tu nous tiens, dans tes griffes dorées !
Aussi, il est très dur d'imaginer de vivre,
Réduit à n'avoir plus nos jouets adorés…
Tout ça pour que, très loin, des gens puissent survivre
Avec plus de confort, et plus de dignité ?
Gentil rêve fraternel, mais notre avidité,
Elle est si viscérale, qu'elle devient carcérale.
Pardon de déranger le bel ordre établi !
Avec mes gros sabots, je piétine les valeurs,
Répandues sur le monde, enrichi des malheurs.
Troublé par les milliards posés sur l'établi,
Accessoires d'un délire, qui fait courir les grands,
Gâchant la vie des gens, par milliards, c'est flagrant,
Et si l'on ne dit rien, on est un lémurien !